Notre maison brûle, pourquoi regarde-t-on ailleurs ?
- UN'ESSEC
- 13 janv. 2020
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 27 juin 2023

Alors que se joue un désastre sanitaire, écologique et humain, la gestion des terribles incendies par le gouvernement australien pose question.
Un désastre écologique et social
Depuis plusieurs mois, l’Australie brûle. Des feux de forêt ravagent l’île-continent, forçant des dizaines de milliers de personnes à quitter leur lieu de vie. Le bilan est particulièrement lourd : 20 morts, des milliers d’habitations détruites, mais surtout des ravages irrémédiables pour la faune et la flore australiennes.
Cette situation stressante n'est pas sans rappeler les terribles incendies de 2009, qui ont laissé une trace douloureuse dans les mémoires des Australiens. En effet, une étude de l'Université de Melbourne montre que près d'un Australien sur 3 souffre de stress post-traumatique, des conséquences qui ne sont toujours pas reconnues par le gouvernement.
Une gestion politique calamiteuse ...
Alors que l’Australie brûle, le chef du gouvernement Scott Morrison s’est distingué en disparaissant quelques jours avant Noël pour passer les fêtes à Hawaï, provoquant alors un véritable tollé. Déjà épinglé par la presse australienne pour sa communication trop légère, M. Morrison, qui, depuis le début des incendies, se refuse à évoquer le réchauffement climatique comme une cause des incendies, a une nouvelle fois provoqué des mouvements de colère dans la population. Il faut dire que parler d’écologie en Australie est un sujet sensible. Le progressiste Malcolm Turnbull, qui voulait inscrire dans la législation un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre, s’en est vu destituer en 2018. Depuis, sous Morrison, aucune nouvelle initiative n’a été prise pour atteindre les objectifs fixés par la COP21.
Même si le changement climatique est inévitablement facteur de ce désastre écologique, le chef du gouvernement australien persiste à nier la corrélation entre les incendies récurrents et l’industrie du charbon qui fait de l’Australie l’un des pires pollueurs au monde.
Son discours consistant à dire que les générations passées ont « également fait face à des catastrophes naturelles, des inondations, des incendies, des conflits mondiaux, des maladies et des sécheresses », et les ont surmontées, ne passe pas auprès de la majorité de la population. Selon un sondage publié par le Guardian, 60% des Australiens attendent du gouvernement des véritables mesures pour faire face à l’impératif écologique.
... Qui agite le spectre d'une future crise sanitaire
Les effets sanitaires des feux sont également physiques. Les immenses panaches de fumée qui s’étendent sur des centaines de kilomètres laissent un air vicié que respirent, parfois depuis des semaines, les Australiens.
Les infrastructures médicales australiennes seront-elles en mesure de faire face à ce nouvel afflux de malades ? Arnagretta Hunter, cardiologue à Canberra, pousse la sonnette d’alarme : " certains services commencent à souffrir de pénuries de matériel. Il manque aussi du personnel médical dans les zones touchées par les feux". A Canberra, ville la plus polluée au monde la semaine dernière, des pénuries de masques antipollution sont à prévoir et attisent l’anxiété des habitants.
Alors qu’un nouveau pic de chaleur est attendu vendredi, un appel à manifester a été lancé par des habitants excédés par l’inaction de leur dirigeant. En 2009, la canicule avait déjà coûté la vie à 500 personnes à Melbourne et Adelaïde. «L’exécutif n’a pas anticipé les conséquences sanitaires du changement climatique, ou les opportunités pour la santé publique de décarboner l’économie » déplore Sotiris Vardoulakis, professeur au Centre australien d’épidémiologie et de santé. Sur le long terme, plus de dix millions d’Australiens pourraient subir les conséquences de ces feux sur leur santé.
Par Christelle Chabane
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