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La Russie tente d’étendre son influence sur un pays voisin

  • Davit Chikovani
  • 2 déc. 2024
  • 4 min de lecture

Depuis avril 2024, la Géorgie connaît de vives tensions politiques internes, opposant, d’un côté, le parti au pouvoir « Rêve géorgien », dirigé par le milliardaire Bidzina Ivanishvili, et, de l’autre, une coalition de partis d’opposition. Ces divisions trouvent leur origine dans un projet de loi controversé proposé par « Rêve géorgien », un parti réputé proche du Kremlin. Ce texte oblige toutes les ONG et les organismes médiatiques recevant plus de 20 % de leur financement de l’étranger à se déclarer comme poursuivant les intérêts d’une puissance étrangère.

Malgré une mobilisation populaire importante contre cette loi, elle a été adoptée, marquant un tournant dans le paysage politique géorgien. La situation s’est encore aggravée après les élections législatives du 24 octobre 2024, au cours desquelles « Rêve géorgien » a été reconduit au pouvoir. La présidente Salomé Zourabichvili, favorable à une intégration européenne, a accusé le parti d’avoir falsifié les résultats électoraux, déclenchant une vague de protestations dans tout le pays. Ces événements révèlent des fractures profondes au sein de la société géorgienne, où l’aspiration à un avenir européen entre en collision avec une gouvernance de plus en plus autoritaire.


Des manifestations contre le pouvoir en place ont eu lieu en face du Parlement géorgien, ce dimanche 1er décembre. 


L’avenir européen de la Géorgie est compromis

La Géorgie, officiellement candidate à l’entrée dans l’Union européenne depuis décembre 2023, semblait jusqu’à récemment se diriger vers un rapprochement progressif avec l’Europe. Ce statut de pays candidat, obtenu après des années de réformes et de dialogues, était perçu comme une avancée majeure pour une grande partie de la population géorgienne, attachée aux valeurs européennes.Cependant, la mise en vigueur de la loi sur les financements étrangers a conduit l’Union européenne à geler le processus d’adhésion, soulignant l’incompatibilité de cette législation avec les normes démocratiques et les principes de transparence défendus par Bruxelles. Ce gel, bien que justifié, a été perçu comme une trahison par de nombreux Géorgiens qui espéraient un soutien plus ferme de l’Europe face à l’ingérence russe.Par ailleurs, la déclaration récente du gouvernement élu, repoussant toute discussion sur l’adhésion européenne à 2028, a suscité une profonde déception. Cette décision, perçue comme une soumission aux intérêts russes, a renforcé la méfiance envers les autorités. Les protestations dans les rues de Tbilissi témoignent d’un clivage croissant entre une population majoritairement pro-européenne et un gouvernement accusé de privilégier des liens plus étroits avec Moscou. La crise actuelle illustre le dilemme auquel est confrontée la Géorgie : choisir entre un futur européen incertain ou demeurer sous l’influence d’une Russie omniprésente.


Un risque d’autoritarisme dans le pays

L’adoption de la loi contre l’influence étrangère marque une étape inquiétante dans l’évolution politique de la Géorgie. Inspirée par une législation similaire adoptée en Russie en 2012, cette loi sert désormais d’outil pour restreindre les activités des ONG et des médias indépendants. En Russie, cette législation a permis au Kremlin de museler l’opposition et de renforcer le contrôle sur la société civile. La transposition de ce modèle en Géorgie pourrait engendrer des conséquences similaires, compromettant les acquis démocratiques du pays.Les manifestations qui ont éclaté après la proposition de cette loi, puis suite aux élections législatives, ont été massives et persistantes. Des milliers de citoyens, étudiants, militants, et figures de la société civile sont descendus dans les rues pour exprimer leur opposition au gouvernement. Cependant, la réponse des autorités a été marquée par une répression violente. Les forces de l’ordre ont eu recours à des gaz lacrymogènes, des balles en caoutchouc et des canons à eau pour disperser les foules. Cette violence a renforcé le sentiment que le pays glisse progressivement vers un régime autoritaire, où les voix dissidentes sont systématiquement réduites au silence.Les opposants politiques et les médias indépendants figurent parmi les cibles principales de cette répression. En outre, le climat de peur et d’intimidation qui s’installe risque d’éloigner davantage la Géorgie des standards démocratiques requis pour une intégration européenne.


Un renforcement du pouvoir russe

La stratégie d’influence de la Russie en Géorgie s’inscrit dans une logique géopolitique bien établie. Moscou a toujours vu d’un mauvais œil les tentatives de ses voisins d’adhérer à l’Union européenne ou à l’OTAN, percevant ces organisations comme des menaces directes à sa sécurité. La Géorgie, en tant qu’ancienne république soviétique, occupe une place particulière dans la stratégie du Kremlin.Le soutien apporté par Moscou au parti « Rêve géorgien » dépasse le simple cadre politique. Il vise à affaiblir les institutions démocratiques géorgiennes et à empêcher toute avancée vers une intégration européenne ou atlantique. En exerçant des pressions économiques, notamment par des restrictions commerciales, et en entretenant des tensions militaires dans les régions séparatistes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud, la Russie cherche à maintenir la Géorgie dans son giron. Ces territoires, occupés par la Russie depuis 2008, constituent une épée de Damoclès permanente, dissuadant la Géorgie de s’éloigner trop de Moscou.


En renforçant son influence en Géorgie, la Russie envoie également un message clair à d’autres pays de la région, comme l’Ukraine ou la Moldavie, qui aspirent à une intégration européenne : toute tentative de rapprochement avec l’Occident sera contrée par des mesures de rétorsion sévères.

La situation en Géorgie est révélatrice des dynamiques complexes qui caractérisent l’affrontement géopolitique entre la Russie et l’Occident. À travers ses actions, le Kremlin démontre une volonté inébranlable de maintenir sa zone d’influence face aux aspirations européennes de ses voisins.Pour la Géorgie, ce conflit se traduit par des choix cornéliens. Alors que la population aspire massivement à un avenir ancré dans les valeurs et les institutions européennes, le gouvernement en place semble privilégier une approche plus conciliante envers la Russie. Cette divergence alimente une crise politique majeure, qui met en péril la stabilité et la souveraineté du pays.Dans ce contexte, la communauté internationale, et en particulier l’Union européenne, doit jouer un rôle crucial. Un soutien accru à la société civile géorgienne, ainsi qu’un engagement diplomatique ferme auprès des autorités, sont essentiels pour préserver la trajectoire démocratique de la Géorgie. Le dénouement de cette crise aura des répercussions majeures, non seulement pour la Géorgie, mais également pour l’ensemble de la région du Caucase, où les tensions entre grandes puissances continuent de redéfinir les équilibres géopolitiques.

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