Mayotte : comment surmonter les difficultés du département d'outre-mer ?
- Mathis Diallo
- 8 févr. 2024
- 3 min de lecture
Si Mayotte est un paradis naturel qui devrait être le « joyau de nos Outre-mer » selon le ministre de l’intérieur et des Outre-mer, la situation économique, sociale et politique sur place n’est pas aussi magnifique que ce que sa nature flamboyante pourrait laisser penser. En effet, Mayotte connaît des difficultés structurelles en raison des afflux migratoires, qui ont indéniablement fait vaciller les politiques publiques depuis ces dernières années.
En cours de semaine, et malgré une crise des agriculteurs en France métropolitaine qui l’a, semble-t-il, tenu très occupé, Monsieur Darmanin est revenu dans un bref colloque organisé par le journal Le Point sur les grands défis et enjeux qui entourent cette l’île, en proie à de nombreuses tensions dans l’archipel. Au premier plan : la sécurité sur l’île et le respect de ses frontières.

Le 5 février, des milliers de manifestants se sont réunis à Mamoudzou pour protester contre l'insécurité
Une situation qui se dégrade depuis plusieurs années
A 8000 km de Paris, 400km de Madagascar et non loin de l’archipel des Comores, cette île de 270 000 habitants concentre les tensions entre populations et forces de l’ordre, et les flux migratoires depuis un certain temps. Le projet « Mayotte 2025 », créé en 2014, définit plusieurs politiques prioritaires à mettre en place pour l’île, parmi lesquelles détruire les bidonvilles en relogeant les habitants d’une manière plus décente, et en luttant contre l’immigration clandestine, majoritairement en provenance de l’État des Comores, d’Afrique de l’Est et du Yémen.
Si Mayotte restait en 2023 le territoire le plus pauvre de France, avec 77% de la population est sous le seuil de pauvreté et un PIB/habitants inférieur à 10000 euros, contre plus de 30000 euros pour le territoire national, la situation économique y reste bien meilleure que pour les autres pays de la zone concernée, ce qui contribue à la rendre attractive (offres de soin, d’éducation, etc…). L’afflux de migrants contribue à alimenter des camps et bidonvilles déjà surchargés, à l’image de ceux de Mamoudzou et du stade de Cavani, et nécessite des dispositifs d’accès aux soins, à la nourriture et à l’emploi aujourd’hui dépassés par le nombre de demandeurs. Ceci se répercute également directement sur la qualité de vie des citoyens français, qui connaissent eux aussi des difficultés d’accès à ces services et ressources, et qui font face à une insécurité croissante.
Des manifestations et des barrages citoyens contre l’insécurité chronique de l’île
« Sous-France », « Paradis transformé en enfer » : telles étaient les pancartes tenues par les manifestants il y a quelques semaines lors de la venue de l’ancienne Première Ministre Elizabeth Borne à Mayotte, qui cherchait alors à ce moment à apaiser la situation. Cependant, les fêtes passées et un remaniement ministériel plus tard, les choses n’ont pas encore évolué et la situation s’est même corsée sur l’île. En effet, des barrages citoyens se dressent depuis une quinzaine de jours contre cette insécurité et cette présence de migrants venus d’Afrique. Pour cause, une série d’attaques et de heurts qui ont éclaté entre plusieurs bandes de l’île, mais également de la part des habitants de l’île contre des campements de migrants.
Aujourd’hui, 90 % des naissances sur le sol de l’archipel ne sont pas des naissances de Mahorais, ce qui pose évidemment le problème d’une insuffisance des ressources disponibles pour couvrir le besoin de toute la population présente sur l’île. En décembre 2023 déjà, l’île avait dû faire face à une crise d’eau potable alors qu’elle souffrait d’une sécheresse sans précédent. L’archipel, dont l’alimentation en eau dépend beaucoup de l’eau des pluies, avait été confrontée à d’importantes coupures de courant.
Une loi spécifique pour le 101ème département français
« L’autorité de l’État va se mesurer non pas simplement en nombre de policiers et gendarmes supplémentaires, mais au changement de droit, sans doute très profond, qu’il faut pour empêcher la venue de ces personnes à Mayotte », a assuré M. Darmanin, jeudi 1er février.
Comme l’exprimait le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin il y a peu, une loi « Mayotte », promise en 2021 puis abandonnée, sera sûrement discutée en 2024 pour traiter les sujets de développement et d’infrastructures dans l’île. Mais en quoi consisterait cette loi ?
Aujourd’hui, le droit du sol permet à un enfant né en France de parents étrangers de devenir français de façon automatique s’il a résidé sur le territoire cinq ans depuis l’âge de 11 ans. Or, selon le journal Le Monde, M. Darmanin pourrait souhaiter que, pour devenir français à sa majorité, un enfant né à Mayotte devra être tenu de prouver que ses deux parents se trouvaient en situation régulière « plus d’un an avant sa naissance », une exigence assez pointue qui risque de créer du mécontentement sur l’île et de contribuer à relancer le débat du droit du sol ou du sang pour accéder à la nationalité française.
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