top of page

Retour de Trump à la Maison Blanche : quelles conséquences sur la mondialisation ?

  • Ariane Bergot
  • 23 nov. 2024
  • 4 min de lecture

Après une victoire massive et incontestable ce mardi 5 novembre 2024, Donald Trump a réussi le retour le plus fracassant de l’histoire politique américaine. Cette victoire, au-delà de refléter les fractures d’une société américaine de plus en plus divisée aussi bien politiquement, socialement, qu’économiquement précipite encore plus l’économie mondiale et la scène géopolitique vers ce que les chercheurs appellent désormais la démondialisation. Dès lors, le phénomène Trump constitue-t-il une véritable rupture politique en tant que tel ou ne serait-ce le fruit d’une évolution presque inévitable conduisant l’empire américain à se replier sur lui-même ? 


Elu pour un second mandat, Donald Trump a devancé Kamala Harris de quatre millions de voix au niveau du vote populaire. Une première dans l'histoire des Républicains.


Le phénomène Trump révèle les profondes fractures de l’Empire américain

Les résultats du 5 novembre sont sans appel : les Etats-Unis sont plus divisés que jamais. C’est d’ailleurs la première fois que le parti Républicain remporte le vote populaire depuis la victoire de George W. Bush en 2004 avec près de 71 millions de voix pour l’Amérique rouge contre 66 millions pour les démocrates. Selon Jérémie Gallon, dans son ouvrage Journal d'un jeune diplomate dans l'Amérique de Trump, Trump a su capter la colère et les frustrations d'une partie de la population qui se sentait laissée pour compte par les élites politiques, notamment les Démocrates. Ces électeurs, souvent issus des régions les plus pauvres, ont voté pour Trump non pas parce qu'il avait des solutions concrètes à leurs problèmes, mais parce qu'il a su exploiter leur mécontentement face à un système qu'ils considèrent comme déconnecté de leurs réalités quotidiennes.

Le slogan "Make America Great Again" (MAGA) incarne une nostalgie pour un passé idéalisé. Un slogan repris en chœur par les électeurs, qui aspirent à un retour à des valeurs conservatrices et à une époque où l'Amérique était perçue comme plus forte et plus unie. Cette quête de grandeur est souvent interprétée comme une réponse à la mondialisation et aux changements démographiques qui ont bouleversé le paysage américain. Trump a réussi à mobiliser ces sentiments en se présentant comme un défenseur des valeurs traditionnelles, tout en rejetant les politiques jugées élitistes et déconnectées. 

La réélection de Trump est également un reflet des fonctions symboliques de l'État-nation. Il a su utiliser des symboles puissants pour créer un sentiment d'identité collective parmi ses partisans. En promettant de restaurer “la grandeur de l'Amérique", et par la mobilisation de récits évoquant un passé glorieux, il a renforcé l'unité nationale, mais aussi les divisions au sein de la société. Ainsi, les symboles de l'État-nation sont devenus des instruments de division plutôt que de rassemblement. Trump a su capitaliser sur ce sentiment de délaissement des classes inférieures face à un système présenté comme corrompu par une élite déconnectée.


L’impact économique : vers une prolifération des « guerres commerciales » ? 

Le retour de Donald Trump à la Maison Blanche est perçu comme un tournant majeur pour l'économie mondiale. Son programme économique, qui inclut des baisses d'impôts massives pour les plus riches et les entreprises, pourrait entraîner un déficit budgétaire de près de 8 000 milliards de dollars sur les dix prochaines années. Cette situation pourrait également provoquer une hausse des taux d'intérêt, rendant l'emprunt plus coûteux, ce qui aurait des répercussions sur l'économie planétaire, notamment en aspirant l'épargne mondiale à un moment où d'autres pays doivent investir massivement dans des domaines cruciaux comme la transition énergétique et la santé. En matière de commerce, Trump a promis d'intensifier la guerre commerciale, avec des droits de douane pouvant atteindre 60% sur les produits chinois et une augmentation générale des tarifs douaniers. Cette politique protectionniste, qui s’inscrit dans la continuité de celle entamée par son prédécesseur, via l’Inflation Reduction Act d'août 2022 et l’augmentation des taxes sur l’acier en décembre 2023, pourrait exacerber les tensions commerciales et nuire aux relations en particulier avec Bruxelles et Pékin.

Sur le plan environnemental, le retour de Trump signifie un retour à des politiques climatiques moins favorables. En tant que climatosceptique notoire, Trump avait précédemment retiré les États-Unis des Accords de Paris. Il a réaffirmé à maintes reprises durant sa campagne ces mêmes positions climatosceptiques. En particulier, il souhaite annuler le décret signé par Biden en 2021, visant à accélérer la transition vers les véhicules électriques aux États-Unis. Ce décret fixe l'objectif que 40% à 50% des ventes de véhicules neufs soient des véhicules électriques ou hybrides d'ici 2030. 


Toute mondialisation est portée par l’avènement d’un Empire, toute démondialisation commencerait-elle par un tel déclin ? 

Dans son étude intitulée « Démondialisation et déclin impérial : fin de l'empire, fin de la mondialisation ? " parue dans la revue internationale et stratégique n°132, l’historien David Todd met en perspective la notion de déclin impérial et celle de démondialisation. Il définit la mondialisation comme un processus de réduction des échanges économiques et culturels à l'échelle mondiale. La démondialisation est ainsi présentée non seulement comme une tendance économique, mais aussi comme un mouvement social et politique qui cherche à rétablir des équilibres perdus.

En s’appuyant sur une comparaison historique en particulier avec les empires romain et anglo-saxon, il affirme que chaque processus de globalisation des échanges est porté par une puissance qui conserve le leadership. Or, le déclin de ces empires conduit quasi incontestablement à une remise en question de la pérennité de ces échanges. L’historien analyse ainsi le cas des États-Unis, qui ont longtemps été considérés comme leaders incontestés de la mondialisation. Todd argumente que le déclin américain est symptomatique d'une crise plus large, où les anciennes puissances impériales peinent à maintenir leur influence face à l'émergence de nouveaux acteurs sur la scène mondiale – ici on se réfère notamment aux néo-empires, Chines, Russie, Iran, Turquie et les BRICS..

Todd propose enfin une réflexion sur l'avenir de la mondialisation à travers le prisme de la démondialisation. Il suggère que les sociétés doivent envisager des modèles alternatifs de développement qui privilégient la durabilité et l'équité. La fin de l'empire et de la mondialisation pourrait ainsi ouvrir la voie à de nouvelles formes de coopération internationale, basées sur des valeurs partagées plutôt que sur la domination économique, à condition bien sûr, de partager ces valeurs. Il semblerait que le retour de Donald Trump à la maison Blanche précipite cette tendance plus rapidement que prévu...


Opmerkingen


Ajouter un titre.png

Inscrivez-vous à notre newsletter pour recevoir nos dernières publications

  • LinkedIn
  • instagram
  • facebook

©2023 by La UN'e.

bottom of page