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Essor de la cyberguerre : les ordinateurs bientôt plus importants que l’infanterie ?

  • Thibault Vivet
  • 8 mars 2024
  • 4 min de lecture

La cyberguerre est un conflit armé mené dans le cyberespace. Elle n'est pas seulement une question de piratage ou d'espionnage informatique, il s'agit d'utiliser les capacités cybernétiques (hacking, désinformation…) pour obtenir des effets stratégiques comparables à ceux obtenus par les formes traditionnelles de guerre. Bien que ce terme soit utilisé depuis déjà une dizaine d'années, ce dernier n’a pas cessé de gagner en popularité étant donné la dimension informative et technologique des récents conflits. Certaines puissances, ont très bien identifié le potentiel géostratégique de la cyberguerre et l’ont parfaitement intégré dans leur arsenal. Pour aborder cette thématique, il faut donc avant tout étudier le leader dans le domaine : la Russie.




Des Marines de l'US Cyber Command.


Un exemple de capacité de projection de la Russie dans le cyberespace

Avec la guerre en Ukraine, la Russie a déployé l’entièreté de son arsenal pour tenter de prendre le dessus dans la cyberguerre. Cependant il ne faut pas être naïf, la Russie n’a pas attendu le début de la guerre pour étendre sa propre toile sur le web. Influence sur les élections américaines, attaque TV5Monde en Allemagne pour diffuser de la propagande pro-Etat islamique, attaques du groupe de hackers pro-russe Killnet, paralysie du système informatique d’hôpitaux français… La liste est bien évidemment non-exhaustive, d’autant plus que nous ignorons sûrement la majorité des attaques qui ont eu lieu.

Cette capacité russe de projection dans le cyberespace s’est donc parfaitement illustrée avec la guerre en Ukraine. Peu après l’assaut et de nombreuses cyberattaques sur toutes les infrastructures du pays, la Russie neutralisait le réseau internet du pays poussant le déploiement du réseau de satellites Starlink d’Elon Musk pour palier à ce problème. Encore récemment, en décembre 2023, la Russie paralysait l’opérateur mobile Kyïvstar (25 millions d’abonnés) pendant plusieurs jours. L’accès à internet et aux infrastructures de communication sont une nécessité pour l’armée, en particulier pour la manœuvre des drones de combat.

 

La cyberguerre dans le monde de l’information

 Mais la cyberguerre ne se limite pas à un intérêt purement militaire. Elle sert d’ailleurs majoritairement à la manipulation de l’opinion publique et à la désinformation. La Russie a mis en place un énorme réseau de désinformation lui permettant de diffuser sa propagande et une certaine réécriture de l’histoire pour justifier l’annexion en Ukraine. Pour renforcer la désinformation et la manipulation de l’opinion publique, le pays use de nombreuses fermes de trolls et soutient en même temps chaque extrême sur tout type de sujet afin de pousser à la polarisation de l’opinion publique. Ils poussent par exemple en même temps les hashtags #BlackLivesMatter et #ALLlivesmatter par le biais, par exemple, du réseau Doppelgänger. Cette stratégie combinée à la confusion créée vis-à-vis de la qualité de l’information reçue et au phénomène des chambres d’échos engendre une polarisation sévère sur les réseaux sociaux. L’objectif est clair, multiplier les fronts pour créer le plus possible de tensions internes dans les pays ennemis.

Cette désinformation vise directement les pays menaçant les intérêts russes. Récemment, une fausse liste de 60 mercenaires français tués en Ukraine est apparue sur les réseaux, quelques mois auparavant de fausses accusations de crimes de guerre français étaient relayées en Afrique… Si les Russes savent que la désinformation n’atteint généralement pas les instances décisionnelles des pays occidentaux, ces derniers ont toutefois bien compris le poids de l’opinion publique sur les décisions que prennent ces dernières.

 

La cybersécurité dans le secteur civil, une nécessité urgente

Services publics, entreprises ou encore citoyens, personnes n’est épargné par la cyberguerre. Au cours des dernières décennies, de nombreux groupes d’hacking soutenus par la Corée du Nord, la Russie, l’Iran ou encore la Chine (71% de l’activité contre les États fin 2022) ont multiplié les cyberattaques sur les administrations et les entreprises occidentales. Les États-Unis sont le pays le plus touché, concentrant 46% des cyber attaques dirigées contre des personnes ou entités américaines. Le récent démantèlement du botnet du groupe de pirates chinois Volt Typhoon, botnet ciblant les infrastructures critiques américaines, témoigne de la lutte constante des États-Unis alors même que ce sont les supposés leaders en cybersécurité. Les entreprises sont-elles aussi particulièrement vulnérables face aux cyberattaques du fait de l’asymétrie des moyens entre certains groupes pirates et ces dernières. En 2021, 28% des PME européennes avaient été touchées. Pour autant, il est toujours difficile de vraiment identifier l’origine des attaques et la majorité de ces dernières n’ont qu’un but lucratif par le biais du ransomware. Ces chiffres montrent surtout l’extrême vulnérabilité du secteur privé et la nécessité d’un investissement massif dans la cyberdéfense.


Si la Corée du Nord, la Russie, la Chine et l’Iran sont représentés comme l’axe du mal dans la cyberguerre, la situation est bien plus complexe. D’autres pays n’hésitent pas à utiliser des stratégies similaires, en particulier les États-Unis qui, comme l’affaire Snowden a pu le révéler, n’ont que peu de vergogne sur les sujets de cybersécurité. Le conflit israélo-palestinien est un autre exemple de pays usant de la désinformation afin de justifier leurs actions, l’un avec un peu plus de moyens que l’autre.

La cyberguerre va prendre une place de plus en plus grande dans les conflits futurs et en cours, du simple fait de la numérisation progressive de notre société et de l’armée. Toutefois, le conflit réel ne disparaîtra jamais pour autant. La cyberguerre n’est possible que parce que des infrastructures bien matérielles existent et ces dernières restent vulnérables à des attaques directes. L’usage de drones ne remplacent pas les soldats, les drones sont beaucoup trop onéreux et servent seulement à neutraliser des cibles stratégiques, un pays ne s’occupe pas avec des ordinateurs et des machines contrôlées à distance, mais par une armée. La cyberguerre vient donc en complément de la guerre traditionnelle, à la différence qu’on peut mener une guerre numérique sans déclarer la guerre ouvertement, voilà-ici un problème majeur pour l’Union Européenne.


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