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L’Amérique Latine et Israël : une fracture diplomatique à son paroxysme ?

  • Thibaut Anglicheau
  • 29 févr. 2024
  • 4 min de lecture

« Ce qui se passe dans la bande de Gaza avec le peuple palestinien n’a pas d’équivalent dans d’autres moments historiques. En fait cela a existé, quand Hitler a décidé de tuer les Juifs ». Le 18 février 2024, le Président brésilien Luiz Inacio Lula Da Silva dresse sans équivoque un parallèle entre la Shoah perpétrée par les forces nazies et leurs complices avec l’offensive israélienne sur la bande de Gaza. Par ces mots, Lula initie une crise diplomatique majeure entre les deux pays. Cette opposition, qui ne doit être considérée comme un épiphénomène, fait possiblement état d’un divorce diplomatique acté entre les pays d’Amérique Latine et Israël.



Des étudiants et militants pro-palestiniens se sont rassemblés le lundi 26 février devant l'ambassade d'Israël au Salvador.


La relation complexe des pays d’Amérique latine avec l’État juif

La relation entre les pays d’Amérique latine et Israël, s’ils n’ont pas toujours été au beau fixe, ont autrefois été bonnes. Du fait des nombreuses communautés juives présentes dans les pays d’Amérique du Sud dans la première moitié du 20e siècle, ces derniers ont vu d’un relativement bon œil la création de l’État d’Israël en 1948. Des pays comme le Brésil, l’Argentine et le Mexique ont été parmi les premiers à reconnaitre Israël. Par conséquent sont nées des relations diplomatiques entre Israël et l’Amérique latine, qui a ouvert des ambassades dans le pays nouvellement formé. 

Nonobstant la bienveillance des débuts, la nature des relations diplomatiques, dès l’abord, ont été influencé par les confits au Moyen-Orient, en particulier par le conflit israélo-palestinien. L’adoption de position critiques à l’égard du traitement du peuple palestinien par Israël a déjà, dès la fin du 20e siècle, engendré des tensions entre Israël et certains pays d’Amérique Latine. Ainsi, plusieurs nations, avant même les événements récents, ont exprimé ouvertement leur soutien du peuple palestinien. Par exemple, Fidel Castro, ancien président de Cuba soutient explicitement son soutien à la cause palestinienne et leur droit à l’autodétermination. Le Venezuela, de façon analogue, a adopté une position favorable à la Palestine. Notamment, le Président Hugo Chavez a reconnu la Palestine en tant qu’État indépendant en 2009. Cette affirmation, qui sera ensuite reprise par la Bolivie, l’Équateur ou le Nicaragua, apparait comme des critiques directes à l’égard des politiques israéliennes.


La dégradation des relations consécutive aux opérations militaires conduites par Israël dans l’enclave de Gaza

L’effort de guerre perpétré par les forces de Tsahal depuis l’attaque terroriste causant plus de 1 200 morts a provoqué des réactions contrastées et nuancées autour du monde. Ces formes de réactions contrastent avec la vigueur des prises de position de plusieurs pays d’Amérique Latine. 

En Amérique du Sud, la présence significative de communautés palestiniennes est intéressante à appréhender. Au Chili vit la plus grande communauté palestinienne en dehors du Proche-Orient. Les réactions particulièrement hostiles des gouvernements latino-américains en ce qui concerne les opérations militaires israéliennes peuvent aussi être analysées sous ce spectre. 

De fait, la comparaison réalisée entre les bombardements israéliens et le génocide nazi est devenue de plus en plus fréquente dans la bouche des représentants de ce continent. Gustavo Petro, président Colombien, dit sans retenue observer le « calque à Gaza » du camp d’extermination d’Auschwitz, lieu où fut orchestré les meurtres de plus de 960 000 juifs. De surcroit, le président Petro, s’il condamne l’attaque du 7 octobre, refuse pour autant de la qualifier de terroriste. Après l’attaque du camp de réfugiés de Jabaliya, au nord de Gaza, le Belize, le Honduras et le Chili rappellent leurs ambassadeurs d’Israël. La Bolivie, elle, rompt complètement les relations diplomatiques avec Israël. 

Comme le souligne Le Monde Diplomatique, l’Amérique Latine se distingue singulièrement de ce point de vue. De manière significative, si la plupart des pays du globe ont fait preuve de leur soutien indéfectible à la politique israélienne depuis octobre, une grande partie des pays d’Amérique Latine, Colombie en tête, ne craint pas de montrer une opposition frontale.


Quelles perspectives aujourd’hui ? 

Somme toute, l’escalade de conflit se déroulant en Israël face à l’enclave gazaoui entraine un refroidissement significatif des relations entre plusieurs pays d’Amérique Latine et Israël. Plus qu’aucun autre continent, ce-dernier ne cache pas sa solidarité à l’égard du peuple Palestinien et sa condamnation de la politique d’un État juif soutenu par une fraction importante de la communauté internationale. 

Le secrétaire d’État américain Anthony Blinken s’est rendu dans la capitale du Brésil ce mercredi 21 février afin de faire part du désaccord des États-Unis vis-à-vis des propos tenus par Lula dressant un parallèle entre la guerre au Proche-Orient et l’holocauste. Les relations diplomatiques entre le Brésil et Israël semblant être à un niveau particulièrement bas, les représentants respectifs des pays n’hésitant pas à s’échanger des paroles injurieuses, le secrétaire d’État américain tente de désamorcer les tensions. Nonobstant cette réunion, il semble clair que les relations entre les pays d’Amérique latine et Israël ne seront reconstruites dans un horizon proche. 


Finalement, il semble que les pays d’Amérique latine ont maintenu le cap tenu depuis le début du 20e siècle. Ils dénoncent sans équivoque la politique militaire israélienne et les attaques dans l’enclave de Gaza, montrent leur soutien au peuple Palestinien et n’hésitent pas à monter au créneau face au gouvernement de l’État juif pour exprimer leur désaccord.



Par Thibault VIVET

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