L’intervention française au Bénin : signe d’une nouvelle politique de Paris en Afrique de l’Ouest
- Charlotte Touboul
- il y a 1 jour
- 3 min de lecture

À la demande des autorités de Cotonou, la France a apporté son aide aux forces
armées du Bénin, face à la tentative de putsch déjouée ce 7 décembre 2025. Après une
série de coups d’Etat qui a fragilisé l’influence de la France en Afrique de l’Ouest, cette
intervention militaire décidée par Emmanuel Macron possède une grande portée symbolique.
Une intervention française à forte portée symbolique face à une tentative de putsch au Bénin
En poste depuis presque dix ans, Patrice Talon, actuel président de la République du
Bénin, doit laisser sa place en avril 2026 au terme de ses deux mandats. Le dimanche 7
décembre, des militaires ont alors fait irruption à la télévision pour y lire un message.
Représentant le « comité militaire pour la refondation » (CMR), ils ont annoncé un coup
d’Etat et proclamé le lieutenant-colonel Pascal Tigri comme leur chef. Ils revendiquent
notamment une dégradation de la sécurité au Bénin et un manque de libertés
fondamentales. Malgré un cadre politique stable et une économie en croissance, le Bénin fait face à de nombreux défis comme la pauvreté persistante, de grandes inégalités et les menaces sécuritaires de ses voisins qui ont été des facteurs politiques, économiques et sociaux importants de cette tentative de mutinerie.
Une tentative de coup d’État révélatrice des fragilités politiques, sociales et sécuritaires béninoises :
Cet événement intervient dans une Afrique de l’Ouest secouée par une forte instabilité politique depuis le début de la décennie avec des coups d’Etat au Mali, au Burkina Faso, au Niger, en Guinée et plus récemment, fin novembre, en Guinée-Bissau. Pour parvenir à reprendre le dessus sur la situation, les autorités béninoises ont ainsi fait appel aux pays voisins, et notamment au Nigeria, ainsi qu’à la Communauté économique des Etats
d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) qui a retrouvé son rôle d’instance régulatrice dans la sous-
région en déployant immédiatement des troupes au Bénin, rôle qui était largement fragilisé depuis 2020 à cause des différents coups d’Etats de la région.
La CEDEAO et les acteurs régionaux mobilisés dans un contexte d’instabilité ouest-africaine :
Mais cette fois-ci, pour la première fois depuis 2023, la France a également déployé
ses moyens militaires pour défendre Patrice Talon, un des chefs d’Etat africains les plus
proches d’Emmanuel Macron, la France et le Bénin étant notamment liés par des accords de coopération militaire depuis 1977, régulièrement mis à jour. Le rôle de la France a été principalement un soutien technique et logistique aux forces loyalistes béninoises et à l’action régionale. La France a officiellement fourni une aide en termes de surveillance, d’observation et de soutien logistique. En apportant son aide notamment en matière de renseignement au Nigeria et à la CEDEAO, la France s’aligne sur la puissance régionale, ce qui lui confère une légitimité par procuration, car elle agit en soutien à un mécanisme de sécurité africain.
Le retour militaire discret mais stratégique de la France aux côtés du Bénin :
Cette intervention de la part de la France peut être vue comme un tournant. En effet,
à force de ne pas réagir ces dernières années, Paris a perdu du terrain et une réelle prise de conscience de cet enjeu semble avoir eu lieu. Cette opération montre ainsi une politique française qui se veut fidèle à ses alliés et qui souhaite de nouveau gagner en influence dans la région tout en gardant profil bas. Par ailleurs, la France se devait de réagir puisque l’arrivée au pouvoir d’un putschiste hostile – tel que semblait l’être le lieutenant-colonel Pascal Tigri – au Bénin aurait été un nouveau revers sur le continent. Après le Mali, le Burkina Faso et le Niger, qui ont formé l’Alliance des Etats du Sahel (AES) et ont basculé du côté de la Russie, un retournement similaire de ce pays partenaire aurait constitué un bouleversement régional majeur. Il aurait notamment, avec le port de Cotonou, offert aux juntes sahéliennes le débouché maritime stratégique qu’elles cherchent tant. Si la France avait été priée par les gouvernements africains de fermer ses bases militaires dans les pays de l’AES, ainsi qu’au Tchad, Sénégal et à la Côte d’Ivoire, cette intervention au Bénin est la preuve que la France semble faire un retour sur le continent et utiliser certaines des bases, comme celle du Bénin, comme base de projection pour réagir.







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