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La Chine, nouveau leader de la géopolitique de l'énergie

  • Xochitl Manchon
  • 28 nov. 2023
  • 4 min de lecture

Alors qu’en 2022, la Chine approuvait 106 gigawatts de nouveaux projets, soit l’équivalent de deux grandes centrales à charbon par semaine, en 2023, les investissements chinois dans les énergies renouvelables occupent le premier rang mondial. Par ses besoins immenses mais aussi au travers de ses initiatives audacieuses et de ses investissements massifs, la Chine redéfinit les contours du paysage énergétique mondial, posant la question cruciale : la Chine est-elle en passe de devenir le nouveau leader de la géopolitique de l’énergie ? 





Des besoins croissants au cœur de la politique étrangère chinoise

D’après l’Agence internationale de l’énergie, la Chine consomme près du quart de l’énergie mondiale, lui conférant le titre du plus grand consommateur mondial de pétrole, de charbon et d’énergie électrique. Ces besoins colossaux, la Chine les doit à son rôle d’atelier du monde spécialisé dans l’industrie lourde et manufacturière ainsi que la construction. En outre, l’occidentalisation du mode de vie de la population chinoise augmente, de fait, la consommation d’énergie.Pour garantir la croissance économique du pays, Pékin doit donc assurer la sécurisation des approvisionnements énergétiques. A ce titre, la Chine applique une approche multiforme. Au niveau national, on assiste à une diversification et une intensification des moyens de production d'énergies avec, par exemple, la construction du plus grand barrage au monde à Lianghekou dans la province du Sichuan. Au travers du projet One Belt, One Road, la Chine s’approvisionne désormais en matière de pétrole auprès d’une trentaine de pays à travers le monde avec, en tête, l’Arabie Saoudite, l’Iran, L’Irak, le Sultanat d’Oman et l’Angola. Les entreprises chinoises s’implantent également en Amérique du Sud ou en Afrique où elles développent un modèle alternatif afin d’accéder aux ressources du continent aussi appelé le consensus de Pékin : des matières premières contre des investissements directs à l'étranger et des infrastructures. 


Une avance indéniable dans le secteur des énergies renouvelables

Ces dix dernières années, la Chine a émergé comme leader mondial des énergies renouvelables avec à son compte 55% des investissements mondiaux dans l’éolien et le solaire, selon BloombergNEF. L’empire du milieu ne cesse de battre les records en disposant depuis mars 2023 de 228 GW de grandes centrales solaires sur son territoire, soit davantage que tous les autres pays dans le monde cumulés, ou encore en doublant ses capacités éoliennes dépassant l’ensemble de la production européenne. Il faut dire que la Chine dispose d’une géographie plutôt favorable à la production d’énergies renouvelables. En effet, le barrage des Trois Gorges sur le Yangzi Jiang produit, à lui seul, 8% de l’énergie consommée en Chine soit 21% de la production nucléaire française selon le CNES. L’enjeu est triple pour la Chine qui doit faire face aux préoccupations climatiques en engageant sa transition énergétique, répondre à la situation de dépendance énergétique et mener une stratégie d’innovation ambitieuse pour s’assurer la première place dans la production des technologies « vertes » de demain. Ce dernier point est essentiel lorsqu’il s’agit de comprendre la stratégie géopolitique chinoise en matière énergétique. En effet, si la Chine ne peut pas dominer les marchés énergétiques traditionnels, elle entend contrôler celui des énergies renouvelables en s’assurant que les technologies de l’éolien, du solaire, et du stockage d’énergie actuellement disponibles soient majoritairement fabriquées et commercialisées par des entreprises chinoises. Dans cette logique, comme pour le solaire, la Chine s’est positionnée sur l’ensemble de la chaîne de valeur des véhicules électriques ; les six premiers fabricants mondiaux de batteries étant chinois. Face à l’accélération chinoise, l’ensemble des puissances occidentales reste à la traine. L’Europe peine à déterminer une politique commune autour des énergies renouvelables et le nucléaire et devient de plus en plus dépendante de son concurrent chinois en matière technologique. Quant aux États-Unis, selon un rapport du Centre d’engagement international du département d’État américain, la Chine dominerait 37 des 44 secteurs de technologies de pointe analysés allant « des batteries électriques aux communications fondées sur les technologies 5G ou 6G ». Les États-Unis semblent, eux aussi, avoir raté le coche. 


Une place de premier débattue 

Ces trois dernières décennies, les besoins et les politiques ambitieuses de la Chine ont visiblement bousculé les dynamiques géopolitiques autour de l’énergie. De par sa diplomatie énergétique, la Chine est devenue un acteur important dans de nombreux pays et régions riches en matières premières et sources d’énergie notamment le Moyen-Orient et l’Afrique, au grand malheur de l’Europe et des États-Unis. Pour autant, est-ce suffisant pour positionner la Chine comme leader de la géopolitique de l’énergie ? D’abord, les intérêts énergétiques ne peuvent aucunement être déliés des enjeux géopolitiques et diplomatiques classiques. Or, pour l’instant, la Chine reste deuxième derrière la superpuissance américaine. Par ailleurs, si le géant chinois est si actif sur le plan énergétique c’est qu’il fait face à « l’inquiétude énergétique ». En effet, un affaiblissement de la croissance économique du pays, en raison d’interruptions éventuelles des approvisionnements ou une hausse imprévisible des prix, fait craindre à Pékin un soulèvement social qui pourrait saper la puissance et le contrôle politique du Parti communiste chinois. A ce titre, Emmanuel Hache dans Géopolitique des énergies, souligne que ces défis structurels ainsi que la dépendance persistante placent incontestablement la Chine comme acteur majeur de la géopolitique de l’énergie mais aucunement comme unique maître du jeu.

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