La guerre actuelle au Soudan
- Xavier Petit
- 29 mai 2023
- 3 min de lecture
Depuis Avril 2023 à Khartoum, capitale du Soudan, les affrontements armés plongent la ville et le pays dans une situation de crise politique, militaire et humanitaire. Le conflit oppose deux généraux militaires, autrefois alliés : Abdel Fattah Al-Burhan, chef de l’armée, de facto au pouvoir depuis 2021, et Mohamed Hamdan Dogolo dit "Hemedti" qui dirige les Forces de Soutien Rapide, une organisation paramilitaire. Ce conflit qui prend racine au moment du putsch de 2019 met en péril le pays et la région.

Les origines de la guerre au Soudan
Le conflit armé actuel découle d'une lutte de pouvoir entre deux chefs de guerre. Porté par Mohamed Hamdan Dogolo, le FSR est composé de milliers d'anciens vétérans de la guerre du Darfour devenus des effectifs supplétifs à l’armée régulière. En face, le général Abdel Fattah al-Burhane, chef de l'armée, dirige le Soudan depuis sa prise de pouvoir le 25 octobre 2021. Le conflit entre les deux hommes est intimement lié à l'avenir du FSR : l'armée régulière ne rejette pas l’inclusion de ces effectifs en son sein mais veut imposer ses conditions d'acceptation et fixer une fin à leur période d’intégration. Le général Daglo veut, au contraire, une intégration complète de ses effectifs et, pour sa part, prendre place au sein de l'état-major.
En octobre 2021, les deux généraux s’étaient alliés pour expulser les civils avec lesquels ils partageaient le pouvoir depuis la chute du régime d'Omar Al-Béchir en 2019. Cette alliance ne dura pas longtemps : Hemedti critiqua à plusieurs reprises l'échec du putsch qui a, selon ses dires, rétablit l'ancien régime d’Al-Béchir. Le conflit s'est par ailleurs aggravé lorsqu'il a fallu prendre position sur les conditions d'intégration de ses hommes dans l'armée régulière. Les affrontements durent depuis des semaines, empêchant toute solution politique dans un pays qui tente toujours, depuis 2019, d'organiser ses premières élections démocratiques après 30 ans de dictature islamo-militaire. Les deux hommes ne semblent pas disposés à renoncer à cette bataille.
L'armée n'a cessé de critiquer la "subversion du gouvernement" par les « rebelles soutenus par des étrangers » quand Hemedti a déclaré qu'il se battait pour la liberté, la justice et la démocratie.
Des combats toujours très intenses
Ces derniers jours, les affrontements continuent à Khartoum. Lundi soir, après l’entrée en vigueur de la trêve à 21h45, des habitants ont rapporté que des affrontements avaient eu lieu. Depuis le 15 avril, la guerre entre les forces régulières du général Abdel Fattah Al-Bourhane et les Forces de Soutien Rapide du général Mohammed Hamdan Daglo a fait un millier de morts et plus d'un million de déplacés et de réfugiés.
37 jours après le commencement du conflit, les habitants de Khartoum subissent des combats incessants, sous une chaleur étouffante, beaucoup d'entre eux n'ont ni eau, ni électricité, ni téléphone. L'Organisation des Nations Unies a signalé dans la soirée " des combats et des mouvements de troupes alors que les deux camps se sont engagés à ne pas chercher à prendre l’avantage militaire avant l’entrée en vigueur de la trêve".
Impact du conflit sur les pays voisins
Le chaos de la guerre au Soudan a traversé les frontières du pays, une vague d'inquiétude souffle désormais chez ses voisins. Du long de la mer Rouge à l'est, à l'Éthiopie au sud, en passant par l'Égypte au nord ou en traversant la frontière occidentale vers le Tchad, des dizaines de milliers de civils cherchent à échapper à la guerre.
Depuis le 15 avril, tous les efforts pour mettre fin au conflit entre les Forces armées soudanaises du général Abdel Fattah Al-Bourhane, et les Forces de Soutien Rapide du général Mohammed Hamdan Daglo ont échoué. Le bilan civil s'aggrave chaque jour, plus de 500 morts civils et des milliers de blessés, selon les autorités sanitaires soudanaises.
Les puissances régionales multiplient les tentatives de médiation. Cette attitude masque, toutefois difficilement le jeu dangereux auquel elles se sont livrées après la chute d’Omar Al-Bachir, en 2019, en soutenant les deux militaires, au détriment des aspirations démocratiques de la population. Les appels à la désescalade lancés par l’Egypte, les Emirats Arabes Unis et l’Arabie Saoudite sonnent particulièrement faux aux oreilles des Soudanais, nombreux à considérer ces trois pays comme une partie du problème et non de la solution.
En conclusion, le Soudan, un des pays les plus pauvres du monde connait une crise majeure qui vient s’ajouter aux difficultés rencontrées par le pays. Aucune élection démocratique n’a été organisée dans le pays depuis 30 ans bien qu’elles soient vivement demandées par la population. Cette-dernière semble se trouver sous le joug de gouvernements qui se succèdent en défendant leurs intérêts sans jamais écouter les revendications populaires. Aujourd’hui encore, c’est eux qui en paient les pots cassés, sont privés d’eau, d’électricité et de nourriture en raison de ce conflit qui persiste entre deux hommes qui en ont fait une affaire personnelle.
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