Taïwan, un détroit explosif
- Yoan di Cosmo
- 8 mai 2023
- 3 min de lecture
Le président Emmanuel Macron a plaidé en faveur d’une « autonomie stratégique » européenne, au retour de son voyage diplomatique en Chine, le 8 avril dernier. Mais depuis le début du mois d’avril, la Chine multiplie les manœuvres militaires dans le détroit de Taïwan, provoquant par là-même une profonde consternation chez ses alliés occidentaux. Mais alors que se passe-t-il vraiment dans le détroit de Formose, et quel rôle y joue la France ?

Les origines du conflit
Les tensions entre la Chine et Taiwan remontent à la fin de la guerre civile chinoise, en 1949, lorsque les nationalistes ont été vaincus par les communistes et ont fui sur l'île de Taiwan. Depuis lors, Taiwan a maintenu une position ambiguë sur sa relation avec la Chine, affirmant son indépendance tout en évitant de déclarer formellement sa séparation de la Chine continentale. Néanmoins, pour le gouvernement chinois, Taiwan fait partie de son territoire et ne peut pas être considéré comme un État indépendant, et considère de plus que Formose doit être réintégré au territoire national d’ici 2049, pour le centenaire de la proclamation de la Chine populaire.
Ainsi, l’élection de l’actuelle présidente de la République de Chine Tsai Ing Wen en 2016 avait été perçue comme une "gifle pour la Chine". Tsai Ing Wen est en effet la première présidente taïwanaise à être élue sans être membre du Kuomintang, parti politique favorable à la réunification avec la Chine, et considère Taïwan comme un pays "déjà indépendant".
De plus, la Chine reste aujourd’hui extrêmement dépendante de Taïwan pour la production de semiconducteurs, et notamment de son entreprise phare TSMC, ce qui, dans une logique de guerre économique et commerciale ouverte avec les États-Unis, lui pose de nombreux problèmes. Ainsi, la Chine a essayé à plusieurs reprises d’obtenir le contrôle de TSMC, en vain, ce pourquoi une potentielle réunification avec Taïwan serait une aubaine au niveau économique.
Des enjeux stratégiques, mais pas seulement
Bien que le conflit soit situé en Asie de l’Est, nombreux sont les acteurs prenant part directement ou indirectement aux tensions.
Tout d’abord, les États-Unis ont un intérêt stratégique dans la région, ayant signé un traité de défense avec Taiwan en 1954 et fournissant depuis une assistance militaire et économique à l'île. En outre, les États-Unis ont désormais fait du confinement de l’Empire du Milieu une priorité. La Chine considère alors la présence militaire américaine dans la région comme une provocation. La visite de la présidente de la Chambre des représentants américaine, Nancy Pelosi, à Taiwan en août 2022, a donc été considérée comme une violation de la politique d’"une seule Chine" du gouvernement chinois qui a répondu de manière musclée, notamment à travers des manœuvres militaires près de Taiwan.
Par ailleurs, d’autres pays d’Asie de l’Est, notamment le Japon et la Corée du Sud, se disent très préoccupés par la situation, et se remilitarisent rapidement pour faire face à une potentielle escalade du conflit. Aussi, l’Australie a signé en 2021 l’AUKUS avec le Royaume-Uni et les Etats-Unis, pour contrer l’expansionnisme chinois, acquérant au passage plusieurs sous-marins militaires.
Le rôle de la France dans le conflit
Second pays à avoir reconnu la République Populaire de Chine, et allié stratégique du pays depuis, la France essaie depuis plusieurs années de soutenir Taïwan dans les institutions internationales, s’imposant alors comme un médiateur de cette situation. Ainsi, le président français Emmanuel Macron s'est rendu en Chine du 5 au 8 avril 2023 pour une visite d'État de trois jours, accompagné d’Ursula von der Leyen, présidente de la Commission Européenne, dans le but de renforcer les relations économiques et politiques entre l’Europe et la Chine. Néanmoins, a son retour, Emmanuel Macron s’est confié lors d’un entretien avec les Echos à propos de la position de l’Europe sur le conflit sino-taïwanais. Il a affiché une volonté de neutralité, non partagée par de nombreux pays européens au nom desquels il parlait supposément, ce qui a provoqué un véritable tollé médiatique, et a remis en question la position de la France sur le conflit.
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